En quittant Page et le Lake Powell en direction de l'Ouest (pour rejoindre Kanab, puis éventuellement les parcs de Zion, Bryce Canyon, ou la rive nord du Grand Canyon), la route US89 remonte sur les plateaux au nord du Colorado.
Une immense zone protégée se trouve juste au sud de cette route : Vermilion Cliffs National Monument.
Ce secteur cache un nombre conséquent des pépites de l'Ouest Américain, avec en tête de liste The Wave, la vague rocheuse photogéniquement hors-norme que seuls une poignée de veinards sont autorisés à explorer chaque jour.
D'autres noms de formations rocheuses font rêver par ici les baroudeurs qui s'engagent un peu en dehors des circuits classiques : le Paria Canyon, White Pocket, Thousand Pockets, Edmaier's Secret, Coyote Buttes, White Pass, Buckskin Gulch, et cetera...
Un dénominateur commun et une limitation notable cependant : l'absence totale de bitume et - au mieux - des accès par de longues pistes défoncées ou sableuses, rendant définitivement inatteignables sans un vrai véhicule tout-terrain beaucoup de ces merveilles.
Par conséquent avec notre camping-car, une collecte sérieuse d'informations s'impose avant de s'aventurer en dehors de la route principale, et il y a deux sources majeures le long de la Hwy 89 en direction de Kanab :
- le Visitor Center de Big Water (en fait dédié au Grand Staircase Escalante National Monument, la zone protégée au nord et donc pas celle de Vermilion Cliffs qui se trouve au sud, mais bon en tant que proches voisins les rangers peuvent donner quelques renseignements).
- la Paria Contact Station, le poste de rangers qui contrôlent le Paria Plateau et les Vermilion Cliffs, parfaitement au courant de l'état actuel des pistes et des possibilités de camping sauvage.
Il en ressort que d'une part, la loterie quotidienne organisée à Kanab (la veille pour le lendemain) pour la délivrance des 20 permis quotidiens autorisant l'accès à The Wave ne laisse que des chances infimes, même en novembre, et ne vaut pas l'aller-retour jusqu'à la ville par rapport à notre position malgré le lot extraordinaire à gagner en cas de réussite.
Et que d'autre part, nous devrions pouvoir tenter avec le camping-car la House Rock Valley Road : 13 kilomètres de piste en tôle ondulée et pleine de caillasses traitresses pour les pneus, mais en conditions sèches à cette époque et menant entre autres au trailhead de Wire Pass, lui-même permettant d'enchaîner dans Buckskin Gulch.
Alors honnêtement, Buckskin Gulch (le « ravin en peau de chevreuil ») on n'avait jamais lu ou entendu ce nom avant de mettre les pieds dans l'Ouest. Sur certaines cartes, on le trouve aussi indiqué tel que Kaibab Gulch, ou encore The Dive.
Et puis au fil de blogs d'aficionados du secteur, on a vu revenir à plusieurs reprises cet aguichant « plus long slot canyon de la planète » perdu dans les plateaux du Colorado...
Imaginez un couloir de 60 mètres de haut et quasiment jamais plus de 3 mètres de large... long de plus de 20 kilomètres !
La totalité s'explore, avec toutes les précautions d'usage concernant les prévisions météo car une fois engagé dans le canyon il n'y a qu'un unique échappatoire à mi-parcours pour en ressortir avant son extrémité, en deux jours et en bivouaquant dans le canyon.
Buckskin Gulch finit par déboucher - au prix d'un passage final particulièrement délicat - dans un autre canyon plus large, celui de la Paria River. Qu'il est ensuite possible de remonter (vers la Paria Contact Station) ou de descendre (jusqu'à Lee's Ferry sur le Colorado) : Vermilion Cliffs est aussi un formidable terrain de jeux pour les aventuriers en sac à dos !
On croisera d'ailleurs sur le parking du départ des sacrés aventuriers français : Laetitia, Sylvain, et leurs deux enfants qui traversent les Amériques... en vélo (On prend le temps DeM) !
Nous nous sommes contentés - en famille ! - de quelques heures de marche, au départ du trailhead de Wire Pass.
Il y a aussi un départ directement dans Buckskin Gulch moins loin sur la House Rock Valley Road (après environ 7 kilomètres sur la piste) mais il fait manquer le slot canyon impressionnant de Wire Pass, pour parcourir à la place la section la moins intéressante de Buckskin Gulch.
Un permis (6 dollars par adulte, en self registration en mettant les sous dans une boîte au parking Wire Pass) est obligatoire pour Wire Pass et Buckskin Gulch.
Peu après le début du sentier, un panneau marque une bifurcation vers la zone de Coyote Buttes North. Si l'on n'a pas gagné à la loterie pour The Wave, interdiction de s'y aventurer : c'est par là que l'on accède à la mythique formation rocheuse... et les rangers veillent !
Après moins d'un kilomètre à marcher dans le wash (le lit de torrent à sec) qui constitue le chemin, on s'engouffre dans la première section du slot canyon de Wire Pass.
Un énorme rocher éboulé constitue un passage délicat dans cette partie. Il faut enjamber le bloc et chercher à tâtons le bout de bois qui permet de descendre.
Si c'est bloquant, un « itinéraire bis » contourne tout ce défilé par le haut (traces à même la roche sur la droite à l'entrée du canyon).
Ce premier narrow débouche sur un espace moins encaissé, puis Wire Pass se rétrécit à nouveau à une largeur d'épaules sur un court tronçon.
Ce second rétrécissement spectaculaire s'ouvre brutalement sur une sorte d'amphitéâtre naturel, en fait la confluence avec Buckskin Gulch.
À cet endroit sur la paroi, on peut voir quelques pétroglyphes amérindiens !
En sortant de Wire Pass, on se trouve donc à un « T » : des deux côtés c'est Buckskin Gulch.
Mais à gauche (vers l'« amont ») le canyon revient vers le point de départ à mi-chemin sur la House Rock Valley Road et cette section de 5 kilomètres n'est pas la plus spectaculaire.
Vers la droite (c'est-à-dire en direction du sud) par contre, c'est la « descente » de Buckskin Gulch : on s'engage ni plus ni moins dans une fente rocheuse de plusieurs dizaines de kilomètres !
Les parois de Buckskin Gulch sont aussi sombres que celles d'Antelope Canyon sont lumineuses, et l'ambiance ici s'en trouve d'autant plus marquante !
Comme pour toutes les explorations de slot canyons, il y a un risque à ne pas prendre à la légère : les flash floods.
En cas de forte pluie soudaine (en particulier avec les orages de fin d'été) en amont, un torrent de boue et de pierres s'engouffre dans le canyon et embarque tout, parfois dans des proprotions difficilement imaginables.
Les amas de troncs d'arbres coincés très haut sont là pour en attester...
Mais ce sont également ces puissantes inondations qui ont érodé au cours du temps les tourbillons et les courbes si photogéniques dans les parois du canyon...
Du fait de sa prodondeur (c'est le slot canyon le plus encaissé connu à ce jour dans l'Ouest Américain) et de son étroitesse, Buckskin Gulch ne voit que rarement la lumière du soleil atteindre le sol !
Buckskin Gulch est plat et sans difficulté à part quelques possibles zones boueuses résiduelles (il n'y en avait pas la moindre sur toute la partie que nous avons exploré) à traverser.
Après environ une heure de marche depuis la confluence avec Wire Pass, les falaises s'élargissent un peu (avant de se resserrer à nouveau plus loin).
C'est par ici que nous avons fait demi-tour !
De retour en fin d'après-midi au parking de Wire Pass, sur lequel il est interdit de passer la nuit (sans doute pour éloigner des petits malins d'un accès nocturne et discret au sentier menant à The Wave), on cherche un spot de bivouac dans la vallée.
Un camping officiel du BLM (Stateline, pile sur la frontière entre l'Utah et l'Arizona) se trouve environ 2 kilomètres plus loin en continuant sur la House Rock Valley Road, mais vu son état on préfère ne pas s'éloigner encore davantage sur cette piste.
On repart donc vers le nord en direction de la route de Kanab...
Et finalement - en explorant prudemment à pied quelques pistes annexes - il y a plusieurs spots potentiels pour du camping sauvage le long de la House Rock Valley Road, au milieu des genévriers... et dans un calme absolu !
|
||
liens utiles
|
Commenter cet article