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Lago de Yojoa

Lago de Yojoa

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Pour de nombreux voyageurs qui traversent l'Amérique Centrale par la route, rejoindre le Nicaragua depuis le Guatemala (ou inversement) est souvent une partie qui fait pas mal réfléchir sur l'itinéraire à adopter, deux pays à la réputation sulfureuse barrant le parcours : le Salvador et le Honduras.

Nous n'avons pas dérogé à la règle et notre séjour à la Finca Ixobel au Guatemala avait été l'occasion de quelques interrogations !
La route la plus empruntée reste celle au sud, par la Panaméricaine à travers le Salvador puis une petite tranche du Honduras. Et trois passages de frontières avant d'être au Nicaragua...

Les frontières à franchir, c'est vraiment une corvée en Amérique Centrale. Et les entrées-sorties au Honduras et au Nicaragua sont réputées les pires, avec une succession interminable de formalités administratives, propices à toutes sortes de magouilles.
Alors pour s'économiser les douanes salvadoriennes et les postes-frontières surchargés de la Panaméricaine, on a ébauché ce tracé un peu en dehors des routes habituelles.

Honduras

Cette traversée en diagonale du Honduras nous a quand même fait hésiter jusqu'au dernier moment...
Si la criminalité record du Salvador aurait plutôt tendance à reculer depuis l'arrivée du président Bukele, au Honduras c'est toujours pire et le pays truste désormais invariablement le titre de l'état au taux d'homicides le plus élevé au monde.

En cause : les maras, les gangs des pays d'Amérique Centrale, aux activités criminelles diversifiées. Ils se flinguent évidemment pas mal entre eux, mais toute la population est confrontée à leur fonctionnement mafieux, à base de racket, vols, trafic de stupéfiants...
Et dans un pays pauvre avec un passé récent de guerre civile, le terreau est fertile pour le recrutement de membres dans les bandes armées.

Un article lu la veille de passer la frontière mentionnait qu'à San Pedro Sula la « capitale mondiale du crime », que l'on doit traverser dans la foulée, la prestation d'un tueur à gage coûtait 10 dollars.

Décor planté donc, mais un couple de retraités français croisés à Río Dulce et qui venait de passer un mois au Honduras en camping-car nous a convaincus de relativiser, et qu'avec un minimum de bon sens on éviterait les ennuis potentiels.
Alors direction le Lago de Yojoa, un coin a priori paisible dans les montagnes du centre du pays !

Honduras

Comme attendu, au poste-frontière de Corinto - celui du nord-ouest le long de la côte Caraïbe - les formalités pour rentrer au Honduras sont épuisantes (la sortie du Guatemala ne prend que quelques minutes, pour clore les visas et le TIP du camping-car).

Entre autres joyeusetés : avoir à marchander le prix de l'importation temporaire de notre véhicule - comme si c'était une livre de tomates - avec un officier en uniforme derrière son bureau, devoir insister sans fin (et sans succès) pour obtenir un reçu, se voir réclamer des permis de circulation pour nos trois vélos (et bien sûr la taxe fantaisiste qui va avec), enchaîner les allers-retours entre la douane, une baraque improbable pour les photocopies et un changeur de monnaie - finalement le plus honnête de tous - dans la rue pour pouvoir payer les taxes en lempiras honduriens...

Plusieurs heures (dont deux rien que pour le permis du camping-car, et encore en se répartissant les tâches et en courant partout) de délire dont on est sortis assez fatigués et surtout complétement ahuris par l'escroquerie ambiante affichée ouvertement : tu payes le tarif imposé ou tu passes pas.

Une bonne surprise quand même de ce passage de frontière excentré : la route en excellent état aussi bien côté Guatemala depuis Río Dulce qu'ensuite côté hondurien jusqu'à Puerto Cortés !

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À Puerto Cortés, on retrouve la Mer des Caraïbes quittée deux semaines plus tôt au Bélize, de l'autre côté du Golfe du Honduras.
Rien de fabuleux : une avenue déserte le long de la plage, quelques hôtels délabrés avec des gardes armés à l'entrée, des installations portuaires au loin, et des pickups de militaires qui font des rondes...

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Pourtant la côte Caraïbe du Honduras attire de nombreux touristes, mais concentrés sur l'île de Roatán au large : connue pour ses plages, son récif corallien (l'extrémité sud de l'immense barrière de corail du Bélize) et sa vie marine, les plongeurs y viennent des quatre coins du globe... en avion et sans s'arrêter sur le continent.

Pour nous dans l'immédiat, la suite fait moins rêver. On doit traverser San Pedro Sula, la ville des Amériques qui surclasse désormais São Paulo au palmarès de la criminalité.
En fait on n'aura pas d'autre souci que de perdre quelques heures dans des embouteillages monstres, en expérimentant des modes de conduite qui feraient même passer les Mexicains pour des conducteurs disciplinés, et de devoir gérer des gamins qui sautent sur le capot et s'accrochent aux rétroviseurs du camping-car !

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Point de chute visé : le lago de Yojoa, le plus grand lac du Honduras entouré par les montagnes au centre du pays.
Un coin tranquille éloigné des grandes villes anxiogènes, où l'on peut faire des randos, du canoë, se balader dans les plantations de café et de cacao...

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Avec comme camp de base la « D&D Brewery », un backpacker dont on a entendu du bien et où il semblerait que tous les - rares - voyageurs au Honduras finissent par passer un jour ou l'autre !
Pour les camping-cars et autres véhicules aménagés, un grand terrain est prévu en face de la guesthouse (l'accès étroit nécessite pas mal de manœuvres), à 3 dollars par personne et par nuit.

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Cette pépite est située près du lac, entre Peña Blanca et Las Vegas, au niveau des loueurs de kayaks le long du petit canal qui rejoint le lago de Yojoa.
Par contre avis aux intéressés : il faut éviter à tout prix l'itinéraire qui passe par Río Lindo et San Buenaventura (où se trouvent les impressionnantes cascades Pulhapanzak) pour s'y rendre. C'est une petite route en montagnes russes pleine d'ornières assassines sur des kilomètres et des kilomètres, qui nous a achevés.
Plutôt faire le détour par La Guama pour atteindre Peña Blanca, c'est infiniment plus simple.

Feu tous les soirs (il caille en altitude et ça limite les moustiques !), jeux et ambiance voyage : on était pas mal !

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Le fait que la D&D Brewery soit - comme son nom l'indique - une brasserie artisanale n'est sans doute pas étranger à sa réputation parmi les routards en Amérique Centrale...
Les bières y sont variées, particulièrement réussies, et au cours du lempira (30 lp pour 1 €) le coût de quelques pintes défie toute concurrence !

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De nombreuses activités nature sont possible dans les environs : kayak sur le lago de Yojoa, excursion aux cascades Pulhapanzak, rando guidée à l'aube dans les montagnes de Santa Barbara pour tenter d'apercevoir les quetzals, balade dans les plantations du voisinage...

À 15 minutes de marche de la guesthouse, la Finca Paradise est une vaste propriété avec des centaines de caféiers et de cacaoyers... Difficile de dire s'il y a encore une activité ici, on ne croise personne d'autre que le garde à l'entrée.
Pour quelques billets on peut se balader dans le domaine et parcourir les sentiers, la superficie est telle qu'il y a largement de quoi y passer la journée et de grimper un dénivelé respectable de la vallée aux crêtes.

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Des bassins bleus turquoise et une belle rivière complètent le tableau...

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Après trois jours au lago de Yojoa, on reprend la route.
Cap sur le Nicaragua en trace directe, en estimant arriver assez proche du poste de douane de Las Manos au bout d'une grosse journée au volant, afin de pouvoir s'attaquer aux formalités le lendemain de bonne heure (l'entrée au Nicaragua étant réputée la plus fastidieuse de tous les passages de frontière en Amérique Centrale, il vaut mieux prévoir large)...

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La progression est bonne jusqu'à Tegucigalpa, la route principale flambant neuve traversant le pays de San Pedro Sula à la capitale (carretera 5) constituant l'une des seules promesses électorales tenues de toute l'histoire du Honduras !
200 kilomètres vallonnés, via Siguatepeque puis Comayagua, mais en très bon état et souvent à double voies (avec deux péages minimes jusqu'à Tegucigalpa : 2 x 80 lp en camping-car).

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Quant à la tentaculaire Tegucigalpa, on ne va pas mentir : la circulation y est anxiogène.
Favelas étendues très loin autour de la capitale à traverser, difficultés d'orientation, routes encombrées et défoncées... on aurait clairement été plus à l'aise dans une petite voiture banale qu'au volant d'un camping-car de gringos aux dimensions inadaptées !

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Encore quelques heures de route - en beaucoup moins bon état cette fois - et on arrive à Danlí en soirée, dans les (modestes) montagnes à l'est du Honduras. Nous sommes à moins de 50 kilomètres de la frontière : la mission de la journée est accomplie, et sans galère d'aucune sorte.

Rare - sinon unique - spot recensé sur l'appli iOverlander pour camper dans le coin, la Villa Alejandra est un genre de gîte décrépi à flanc de colline, au bout d'un chemin de terre pentu à la limite des capacités du camping-car.
La nuit tranquille et la petite piscine valent bien les 250 lempiras demandés (environ 8€) par les gérants, seules âmes qui vivent dans le coin...

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Le câblage électrique de l'habitacle refaisant des siennes, le jour suivant on écume Danlí à la recherche de fusibles, se faisant trimballer d'échoppe de quincaillerie en comptoir de pièces auto.
Alors qu'on ne pensait y abandonner que quelques minutes avant de se lancer sur la route du Nicaragua, la matinée complète y passe. Et lorsque l'on vient enfin de trouver les modèles adéquats, le camping-car stationné en ville refuse de redémarrer et la clé de contact reste coincée...

Au bout d'une heure de recherches sans succès, faussement orientés par nos récents pépins d'électricité, le stress a atteint un niveau assez élevé et on fait l'attraction de toute la rue.
Le gardien rassurant d'un hôtel tout à côté surveille que l'on n'ait pas d'autres ennuis en plus de notre souci mécanique...

Et puis quelqu'un dans l'attroupement appelle un garagiste de sa connaissance en renfort, le gars débarque en 5 minutes et solutionne le problème en 30 secondes : le sélecteur de la boîte auto est resté légèrement positionné entre deux vitesses, du coup l'électronique bloque tout démarrage et retrait de clé. Désormais on le saura...

Au-delà du gag, ce qu'il y a à retenir c'est que finalement la situation n'était pas aussi délicate qu'on aurait pu le croire, en panne dans les faubourgs d'une grande ville du Honduras. Bien au contraire tout le monde a essayé de rendre service, et le garagiste sauveur a refusé dans un grand sourire le billet qu'on lui tendait...

Du coup la journée est bien trop avancée pour tenter le passage au Nicaragua, remis au jour suivant après une nouvelle nuit à la Villa Alejandra.