Le cahier des charges pour le choix de la destination était assez simple : un trajet pas trop long depuis la Martinique, avec juste une semaine de vacances à consacrer à l'ensemble du voyage on n'avait pas très envie de perdre un jour en transits divers dans chaque sens, et changer d'une île des Petites Antilles pour le besoin de dépaysement...
Alors la Guyane c'était l'option rêvée... jusqu'à ce qu'on déchante sur le tarif des billets : 500€ par personne toute l'année, hors de prix pour un vol aussi court. Heureusement grace à notre petit pécule de Miles chez Air France et un peu de bricolage avec un vol transatlantique faisant escale en Martinique, on a considérablement réduit la facture.
Il ne restait plus qu'à passer par la case vaccination (obligatoire pour la fièvre jaune) et ne pas trop écouter les aprioris antillais au sujet de la Guyane, perçue comme un genre de Far West où l'insécurité serait partout...
Hébergement prévu : les trois premières nuits réservées dans un petit chalet au bord du fleuve à Roura dans les environs de Cayenne, la quatrième sur un petit bateau dans les marais de Kaw, et ensuite impro.
Pour la voiture (absolument indispensable au vu des distances et de la quasi absence d'autre moyen de transport) : louée à l'aéroport de Cayenne, pour 8 jours. Sachant qu'on allait pas mal rouler on a mis de côté les plus petits modèles, mais inutile également de partir avec un pseudo 4x4 type SUV : les pistes guyannaises ne font pas dans la dentelle, si l'on souhaite s'y aventurer c'est un gros pickup qu'il faut envisager...
La première chose qui frappe quand on pose le pied en Guyane : dès la sortie de Cayenne c'est la forêt amazonienne (en fait c'est un petit peu moins vrai si l'on prend la direction de Kourou vers le nord, la route longe la côte et traverse plutôt de la savane)...
Nous on roule jusqu'à Roura, un petit village tranquille à 20 kilomètres au sud de Cayenne, niché au bord du fleuve Oyak et entouré par la forêt.
C'est ici que l'on a booké à l'avance notre premier point de chute... Roura nous semblait pas mal comme camp de base avec de nombreux points d'intérêt dans la région, au-delà d'un bon petit éventail à proximité immédiate de sentiers à faire à pied et de rivières (appelées
criques en Guyane) à explorer en canoë. Cayenne n'est pas non plus très loin pour le ravitaillement, ses plages et son marché.
Il n'y a pas pléthore d'hébergements de manière générale en Guyane, en préparant un peu le séjour le choix avait été assez vite fait pour « Rour'Attitude » et ses petits bungalows les pieds dans l'eau...
À noter que dans la plupart des hébergements en Guyane, il y a un ou plusieurs carbets destinés aux voyageurs qui veulent y tendre leur hamac. Ou tout simplement pour les Cayennais le week-end, l'activité populaire de fin de semaine consistant à remonter l'un des innombrables fleuves en pirogue ou bateau à moteur jusqu'à des abris de fortune en pleine forêt, ou des gîtes avec carbets annexes.
Alors bon même si le mode « hamac » ne nous déplairait pas, faut aussi penser à Mini-Lapinette (en Martinique on n'arrive même pas à y lui faire faire la moindre sieste) donc pour nous ça sera en bungalow !
La coïncidence fait que l'on a des copains de boulot (beaucoup d'entreprises sont présentes dans chacun des trois DOM que sont la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane et les relations de travail sont courantes de l'un à l'autre) qui habitent aussi au village, à même pas 200 mètres de notre gîte.
Première soirée chez eux dans une magnifique maison en bois juste au bord du fleuve... qui nous donne instantanément envie de quitter la ruche martiniquaise pour la tranquillité absolue du coin. Le décor est planté : dans les poutres du carbet sous lequel on prend l'apéro se baladent une mygale... et un boa d'1m50 de long ! Les copains guyannais eux ça ne les émeut pas plus que ça... le serpent fait partie de leur quotidien !
novembre 2018 :
Cette maison au bord du fleuve a désormais de nouveaux propriétaires, Émilie et Nico, qui proposent une chambre avec tout ce qu'il faut pour être autonome en bas de leur villa.
Le boa bleu a déserté le carbet (à chacun de le voir comme un point négatif ou positif !) mais c'est une très bonne adresse d'hébergement à Roura, à retrouver assez facilement sur AirBnB...
Le lendemain matin, la brume qui enveloppe le fleuve Oyak et la forêt donnent un paysage magique... et il faut imaginer ça avec les cris des singes et des perroquets !
On profite d'être dimanche matin pour faire une virée au village hmong de Cacao. Les Hmong sont l'une des nombreuses communautés vivant en Guyane, avec chacune leur langue et leurs coutumes. À l'origine ce sont des réfugiés qui ont fui le Laos dans les années 1970 et ont été accueillis notamment par la France, en Guyane. Ils ont fondé quelques villages et ont acquis une réputation de producteurs hors pair de fruits et légumes.
Le marché de Cacao est réputé dans toute la Guyane... et donne une impression de « hot spot » touristique que l'on a vu nulle part ailleurs. Enfin... touristique à l'échelle guyannaise, c'est-à-dire entre une centaine de personnes maxi !
Beaucoup de plats locaux, en particulier la fameuse soupe avec des pâtes, du boeuf, des crevettes et tout un tas de légumes et d'épices. Par 35°C à l'ombre, on préfère se tourner vers d'autres préparations, comme une pâte de chou froid farcie à la viande et roulée dans des feuilles de bananier.
Rarement difficile sur les trucs un peu bizarre à manger, Mini-Lapinette se baffre...
Cacao est à une bonne heure de Roura (ou de Cayenne), par l'unique route qui part en direction de Saint-Georges et du Brésil vers le sud-est. Pour s'y rendre on traverse la grande forêt tout du long, avec quelques points de vue en hauteur.
À noter qu'il est également envisageable de se rendre à Cacao en pirogue, depuis Cayenne ou Roura, en remontant les rivières. Certains excursionnistes proposent ce genre de sorties le dimanche matin pour environ 40€ par personne.
La Guyane c'est aussi ça : dès le milieu de journée, de gros nuages noirs se chargent au-dessus de la forêt et déchargent des averses tropicales phénoménales avec parfois quelques coups de tonnerre en prime.
On est fin juillet, théoriquement la saison des pluies devrait être terminée (et la saison sèche installée jusqu'à novembre ou décembre) mais visiblement la bascule n'est pas encore franchie cette année !
En fin d'après-midi ça se dégage toujours, pour de magnifiques couchers de soleil !
Ou pour aller faire un tour sur l'une des plages de Cayenne...
La plage de Montabo, appelée plus communément « plage du Novotel » par les Cayennais en référence à l'ancien hôtel qui la bordait.
La plage des Salines, homonyme à la plage la plus connue de Martinique... mais celle-ci est à Montjoly (banlieue de Cayenne) !
Alors certes on ne s'attendait pas à retrouver le sable blanc et l'eau turquoise de « nos » plages, mais franchement les plages à l'est de Cayenne sont vraiment sympa, avec la forêt vierge en toile de fond. Et puis l'océan doit avoisiner les 31 ou 32°C...
Juillet c'est la fin de la saison de ponte des tortues luth et même si on a eu la chance cette année de déjà assister à des pontes en Martinique, on ne serait pas contre en rencontrer une nouvelle sur une plage guyannaise... qui sont des sites de ponte majeurs pour les tortues luth, alors que les îles des Antilles sont plus occasionnels.
Effectivement tout le haut de la plage est retourné comme si des bulldozers étaient passés, mais impossible de s'y tromper ce sont bien des nids de tortue...
Au final on n'en croisera pas, mais on n'a pas non plus été jusqu'aux explorations nocturnes, ne sachant pas trop quelle genre de public fréquentait les plages de Cayenne une fois la nuit tombée...
Au fond on aperçoit deux des îlets de Rémire, des petites îles inhabitées connues pour certaines pour leur population en petits singes semi-apprivoisés (des bateaux font la navette chaque week-end et pas mal de visiteurs viennent y pique-niquer...) : les saïmiris.
Ces mêmes singes saïmiris (ou singes-écureuils, ou encore
sapajous pour les inconditionnels du Capitaine Haddock) on les retrouve aussi à proximité immédiate de la ville comme par exemple sur la colline du Rorota où l'on a été leur rendre visite du côté de Rémire, un lieu aussi fréquenté par les joggers.
Il paraît qu'il y a aussi des paresseux toujours dans les mêmes arbres, mais on ne l'a appris que plus tard dans le séjour...
novembre 2018 :
Lors de notre troisième séjour en Guyane, nous sommes retournés au Rorota où l'on a effectivemment pu compter pas moins de cinq ou six paresseux dans les bois-canons au-dessus du sentier, en regardant avec davantage d'attention...
Renseignement pris, c'est un site de relâche des paresseux sauvés par les assos de protection, d'où leur présence nombreuse !
Et les singes saïmiris sont toujours autant !
Depuis ce même sentier du Rorota (la boucle se fait en 2h de marche environ) on a des vues sympas sur les plages de Rémire...
Enfin on ne peut pas clore cet aperçu de Cayenne et de sa banlieue Rémire-Montjoly sans un passage au marché de la ville...
Une sacrée fourmilière regorgeant de fruits, de légumes et d'épices en tout genres ! C'est aussi un coin très vivant pour y manger, beaucoup de petits étals sous la halle proposent une mosaïque de plats d'origines cosmopolites qui reflètent la disparité des communautés présentes en Guyane : on a le choix entre les cuisines créole, chinoise, indonésienne, brésilienne, surinamienne...
Là ce sont des
rotis surinamiens, une sorte de crèpe qui enveloppe un curry avec de la viande et des pommes de terre ! Délicieux, mais vraisemblablement à l'origine de quelques déboires gastriques pour Mini-Lapinette !
Retour à Roura pour un quasi incontournable du secteur : la crique Gabriel en canoë.
C'est un petit affluent du grand fleuve Mahury. Une rivière tranquille qui s'enfonce sous la végétation et que l'on peut remonter à la rame sur pas mal de kilomètres, jusqu'à déboucher pour les plus endurants dans une zone de savane marécageuse : le lac Pali, où vivent cabiais, loutres géantes, anacondas et tout un tas d'espèces d'oiseaux... a priori pas de caïmans dans le coin.
Il y a plusieurs points de départ possibles, on a opté pour le plus classique qui est l'embarcadère du village de Dacca, juste à côté de Roura. Il y a là un prestataire multi-activités :
Wayki Village, qui fait entre autres de la location de canoës de une à trois places.
Comme l'océan n'en est pas si éloigné, la crique Gabriel est influencée par les marées et en calculant bien son coup on peut remonter la rivière avec du courant portant puis la redescendre ensuite également avec un peu d'aide. En se loupant sur les horaires on peut aussi se retrouver à ramer à contre-courant dans les deux sens...
On a évité le week-end pour faire cette balade, histoire d'être bien peinards... et effectivement on est tout seuls, dans le tunnel à travers la végétation formé par la rivière c'est assez magnifique !
L'eau est bien sombre, il doit y avoir quelques bons gros serpents à y trainer, ça donne pas forcément envie de renverser le canoë et on a fait un briefing poussé à Mini-Lapinette à ce sujet !
De toutes façons elle a trouvé une occupation à plein temps : guetteuse de papillons, en particulier les immenses morphos bleu métallique qui zigzaguent de temps en temps autour de nous (et sont très compliqués à prendre en photo depuis une embarcation instable !)...
Finalement on n'est pas allés jusqu'à la fameuse savane inondée du lac Pali, ce qui aurait demandé plusieurs heures de rame dans chaque sens depuis l'embarcadère de Dacca (d'autant qu'on ne s'était pas si bien coordonnés avec la marée)... mais la partie que l'on a faite était déjà bien sympa.
Il y a plein d'autres criques moins connues autour de Roura à explorer en canoë, plus étroites aussi ce qui peut virer au crapahutage entre les troncs couchés en travers du cours d'eau : « crique Serpent », « crique Miroux »... le proprio de notre hébergement à Rour'Attitude les connait toutes et loue également des canoës pour partir en vadrouille directement depuis le gîte.
novembre 2018 :
Un point d'intérêt supplémentaire dans les environs de Roura découvert lors d'un autre séjour : le sentier « coq de roche », sur la route de Kaw.
De novembre à avril durant leur période de reproduction, les coqs de roche viennent parader dans des sites particuliers : les leks. Celui de Roura est facilement accessible en une vingtaine de minutes de marche, par le sentier qui part sur la gauche de la route juste avant la scierie, aux deux tiers environ de la route de Roura au degrad de Kaw.
Des plateformes d'observation ont été aménagées pour observer le plus discrètement possible cet oiseau de la forêt amazonienne, rare et magnifique...
On quitte Roura sur une dernière baignade dans le fleuve Oyak !
La suite maintenant c'est les marais de Kaw, une réserve naturelle isolée à une cinquantaine de kilomètres de Roura, dans laquelle on va embarquer sur un petit bateau pour traquer caïmans et anacondas... et passer la nuit au milieu de tout ce petit monde !
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