Notre départ de Valdez marque symboliquement le début du retour vers le Yukon, et notre sortie progressive de l'Alaska « continentale » (l'état de l'Alaska se prolongeant au sud-est sur une très longue bande de côte - et d'innombrables îles - à laquelle on prévoit d'accéder un peu plus tard par le Canada).
La longue route vers les accès au parc national de Kluane contourne par le nord un gigantesque secteur de glaciers, vierge de toute présence humaine. Mais un petit crochet sur de la piste nous permettra d'aller approcher les hautes montagnes de la chaîne des Wrangell, aperçues au loin en descendant vers Valdez quelques jours plus tôt...
On repart donc vers Glennallen par la Richardson Highway, seule route menant à Valdez et parcourue à l'aller sous un ciel plombé gâchant le paysage.
Les couleurs sont bien plus belles cette fois-ci, et après avoir regrimpé la rude Thompson Pass (en bord de mer, Valdez est encaissé en bas d'une vallée de laquelle on ressort par un col à 900m d'altitude très pentu pour un lourd camping-car) on longe cette fois-ci le Worthington Glacier sous le soleil.
Depuis Glennallen (le carrefour entre les routes de Valdez vers le sud, Anchorage à l'ouest, Fairbanks au nord, et Tok à l'est vers où l'on se dirige) on retrouve les imposants sommets des Wrangell Mountains, qui frisent les 5000m.
Ce ne sont que quelques-unes des centaines de hautes montagnes que comporte le parc national Wrangell - St Elias, dont un certain nombre n'ont jamais été gravies et desquelles descendent de gigantesques glaciers dont certains ne sont même pas encore baptisés.
Ce parc hors-normes, grand comme la Suisse et visité annuellement par une poignée de voyageurs, on ne l'avait même pas remarqué sur la carte avant de voir ces montagnes en allant vers Valdez.
Quelques infos glanées en express au visitor center (arrivés après la fermeture mais tombés sur un ranger sympathique) cadrent la difficulté d'accès du secteur : deux pistes défoncées, la longue McCarthy Road au sud et la Nabesna Road au nord.
On opte pour la Nabesna Road, débutant à Slana sur notre itinéraire de retour vers l'est et semblant relativement praticable sur sa première partie.
Les premiers kilomètres ont été bitumés récemment, et les couleurs de fin de journée sur cette route déserte qui s'enfonce vers nulle part donnent un côté magique à l'aventure...
Les 4950m du Mount Sanford dans le soleil couchant...
... et le lendemain matin au lever du jour !
Le camping est gratuit dans le parc national Wrangell - St Elias, le long des 60 kilomètres au total de la Nabesna Road il y a quelques sites aménagés sommairement et un « vrai » camping (Kendesnii Campground mais au bout de 40 kilomètres, on n'a pas été jusque là).
On s'est arrêtés au site de Kettle Lake (après 15km environ), la nuit tombant et la piste devenant vraiment défoncée.
La bonne surprise en regardant les buissons tout autour : ils sont couverts de baies !
C'est la pleine saison du berries picking en Alaska, et tout le monde profite de l'aubaine, ours comme humains...
Il y en a plusieurs sortes, on en sait pas encore très bien les nommer autrement que « myrtilles » mais la plupart des baies sauvages sont comestibles, et les grosses blueberries délicieuses.
Les vélos nous permettent de pousser un peu plus loin sur la piste et de profiter du paysage...
Quant aux très hautes montagnes (le Mont St Elias culmine à 5500m et le Mont Logan, dans le même massif mais côté canadien donc dans le parc de Kluane, à quasiment 6000m) et aux glaciers infinis, à des centaines de kilomètres vers le sud jusqu'au Golfe d'Alaska, ils ne sont visibles qu'en avion.
Suite à ce petit crochet sympa, on reprend notre route vers Kluane. Pleins divers à Tok où l'on rattrape l'Alaska Highway, puis passage de frontière à Beaver Creek pour un retour au Canada et au Yukon, après environ trois semaines passées en Alaska.
Et il ne faut pas bien longtemps avant qu'un jeune mâle orignal déboule devant le capot, histoire de nous rappeler que dans ce territoire plus qu'ailleurs les animaux sont infiniment plus nombreux que les humains !
Le parc national canadien de Kluane est limitrophe au parc national américain Wrangell - St Elias, et au cumulé ça donne quelque chose comme la seconde plus grande réserve naturelle du monde (la première étant toute la partie nord du Groenland).
De fait la partie visible du parc depuis l'Alaska Higway se limite à la première chaîne de montagnes (les Kluane Mountains) que la route longe sur des centaines de kilomètres. Mais d'autres chaînes, et encore d'autres chaînes, se succèdent les unes derrière les autres.
Par conséquent seule une infime partie du parc est accessible au randonneur lambda. Des itinéraires plus trapus s'enfoncent derrière les premières montagnes dans des vallées où descendent des glaciers démentiels (Donjek, Kaskawulsh...) et se parcourent en s'équipant pour 3-4 jours ou même une semaine de bivouacs.
L'Alaska Highway (déserte sur cette section) suit le lac Kluane qui remplit la vallée sur 50 kilomètres de long...
Kluane (à prononcer classieusement klou-weye-ni) abrite la plus importante population de grizzlys de tout le Canada. Et à Congdon Creek, juste au bord du lac, on découvre un camping (comme tous les autres gérés par le territoire du Yukon, à seulement 12 dollars canadien la nuit avec bois illimité) qui va au-delà des consignes de prudence habituelles...
L'espace réservé aux tentes est protégé par une clotûre électrifiée !
Ciel et horizon assez dégagés, prévisions d'activité modeste mais réelle : le « réveil aurores boréales » est positionné en milieu de nuit.
Avec succès, ce sont les plus belles depuis Edmonton !
Par contre pas d'éloignement exagéré du camping-car par rapport à d'habitude, ne serait-ce que pour descendre au bord du lac à quelques mètres de l'emplacement...
Le « risque grizzly » est pris au sérieux, avec claquements de mains toutes les minutes pour faire du bruit. En finissant par réveiller les voisins, mais pour leur plus grande joie puisqu'ils ont du coup pu profiter du spectacle !
Pour les randos, comme dit plus haut : c'est compliqué. Assez peu d'options pour les marcheurs à la journée seulement, et pour ne rien arranger le centre d'information du lac Kluane (Thechàl Dhâl de son nom amérindien) est fermé, nous sommes mi-septembre et la saison est finie.
Sans ranger pour nous aiguiller un minimum sur les sentiers et les alpages un peu trop fréquentés par les grizzlys, on improvise.
Sheep Creek Trail résonne plutôt bien pour croiser des animaux au régime exclusivement herbivore, au tout début de l'immense vallée de la Slims River qui descend du glacier Kaskawulsh.
Et effectivement après une heure de montée avec un paysage magnifique en toile de fond (à deux pour une fois, Chloé ayant préféré une sieste dans le camping-car qu'une rando « où on sait pas trop ce qu'on va voir ») on tombe sur une famille de Dall sheeps, que nous on traduit peut-être à tort par « bouquetins ».
Ils se laissent tirer le portrait... jusqu'à un éternuement intempestif qui mettra la troupe en déroute !
À Haines Junction, on quitte l'Alaska Highway (qui bifurque vers Whitehorse à l'est) pour continuer vers le sud sur la Haines Highway qui prend le relais pour longer le parc de Kluane. Haines se trouve à 250 kilomètres, ce sera pour le prochain épisode.
Le lac Kathleen, quelques kilomètres au sud de Haines Junction, est habituellement un spot populaire de Kluane... On s'y retrouve absolument seuls !
Particulièrement le long de la Haines Highway, les couleurs de l'automne explosent...
Et une nouvelle rando dans le parc (le lac St Elias) prend une tournure assez féérique !
Rando sur laquelle on ne croisera pas âme qui vive sauf une famille de lagopèdes...
Et malgré tout un petit moment de flottement au bord du lac, lorsque l'on est tombés sur un gros écureuil fraîchement égorgé sur le sentier et qui n'y était pas quelques minutes auparavant, abandonné précipitamment par son propriétaire à grandes dents qui ne devait pas être bien loin.
Le lac Dezadeash, qui marque notre sortie du parc de Kluane en direction de Haines...
Il avait l'air tellement paisible vu comme ça, que quelques jours plus tard lors du retour du Haines on avait prévu d'y camper.
Sauf que dans un vent glacial et sous la pluie, ça ne sera plus vraiment le même tableau...
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