Pour reprendre notre route depuis Haines il y a deux possibilités.
Une première option serait d'embarquer le camping-car sur le ferry pour Skagway, au fond du fjord voisin et administrativement en Alaska comme Haines, puis le début de la Klondike Highway jusqu'à Whitehorse au Yukon (point de passage obligé dans tous les cas). Skagway semble... très différente de Haines (des paquebots de croisière y accostent chaque jour) et on aimerait quitter l'Alaska sur une bonne impression. Et puis le passage d'un véhicule comme le notre est coûteux, plus de 200 dollars pour une traversée d'une heure.
Le parcours retenu est donc de reprendre la Haines Highway en sens inverse - sans que ce soit un drame, la route était magnifique à l'aller - jusqu'à l'Alaska Highway pour rejoindre Whitehorse.
Ensuite il faudra de toutes façons refaire une section de quelques centaines de kilomètres sur l'Alaska Highway déjà prise à l'aller, pour atteindre Watson Lake et l'embranchement de la Cassiar Highway qui permet de redescendre plein sud à travers la Colombie-Britannique.
Bref pas mal de route pour cet épisode, plus de 1600 kilomètres jusqu'au Salmon Glacier que l'on s'était coché comme incontournable.
À Whitehorse, où l'on s'était posés plusieurs jours avant d'attaquer le Klondike, l'automne a pris ses quartiers...
Cette fois-ci il faut également marquer une pause que l'on ne peut plus repousser, moins oisive et au bénéfice des nombreux magasins de bricolage de la ville.
On a un problème électrique dans l'habitacle du camping-car qui nous empoisonne la vie depuis plusieurs semaines : l'onduleur ne donne plus de 110V, ou de façon très aléatoire ce qui rend encore plus délicat le diagnostic. Plus moyen de recharger les appareils photos et ordis, ni d'utiliser quoi que ce soit qui demande autre chose que du 12V.
Après avoir incriminé tour à tour le frigo, les batteries et l'onduleur lui-même, testé des dizaines de fusibles et dévissé la moitié de l'habitacle, c'est finalement au bout d'heures passées à ramper sous le chassis un voltmètre en main que la cause du problème est découverte : une simple cosse de masse brisée aux trois-quarts, qui faisait contact ou non au gré des chaos de la route...
Encore une fois la maintenance d'un camping-car implique d'être à la fois mécano, plombier ou éléctricien !
Heureusement la
Winterlong Brewery découverte à l'aller est toujours là pour souffler à la fin des journées compliquées !
Entre Whitehorse et Watson Lake, même point de chute qu'un mois plus tôt en sens inverse : le camping de Squanga Lake, aussi paisible que la première fois.
À une petite nuance près : les hurlements des loups au loin toute la soirée (ça met l'ambiance au feu de camp) et au petit matin...
À Teslin, deux photos prises quasiment au même endroit à un peu plus d'un mois d'intervalle permettent de se rendre compte de l'avancée de l'automne...
Puis quelques kilomètres avant Watson Lake - où l'on ne repassera finalement pas pour ajouter notre marque à la
Sign Post Forest - on quitte définitivement l'Alaska Highway. La Cassiar Highway va nous permettre de redescendre à travers la Colombie-Britannique sans refaire le même parcours qu'à l'aller.
Longue et très isolée (plus de 700km jusqu'à Kitwanga, qui marque le retour à une certaine forme de civilisation entre Prince George et Prince Rupert), elle est en plus bien moins confortable que la route de l'Alaska, en tout cas sur toute la première moitié.
La sortie du Yukon (snif...) et donc l'entrée en Colombie-Britannique se trouve tout au début de la route.
Outre le côté nature brute - on s'attend quand même à croiser pas mal d'animaux le long de la route - la Cassiar Highway permet d'atteindre plusieurs points d'intérêt sympas.
Boya Lake est le premier : un vaste lac en forêt, à la couleur de lagon et comprenant un dédale de petites îles et de baies. Le paradis annoncé du canoë...
Malheureusement la météo n'est pas de notre côté ce coup-ci. Ciel gris qui ternit les couleurs et surtout températures glaciales décourageant toute activité nautique.
Boya Lake est un parc provincial de Colombie-Britannique et il y a un camping, avec de nombreux emplacements au bord de l'eau. Il est géré en
self registration, tout comme une petite flotte de canoës en libre service (20$CAD pour 2 heures, à glisser dans une boîte).
Si l'on en croit les panneaux au départ des petites randos le long du lac, ça devrait ressembler à ça !
Des loups éloignés - décidément en verve ces derniers jours - ont assuré le fond sonore mais côté couleurs c'était pas au niveau.
Par contre
the industrious work of the Canadian beaver, ça on a bien vu...
Puis en reprenant la Cassiar Highway vers le sud, les kilomètres s'enchaînent, fatiguants car la route est sinueuse et vallonnée. De minuscules villages coupent de temps en temps la monotonie du parcours.
Et régulièrement, un ours noir ou un orignal sur le côté (voire au milieu) de la route secouent un bon coup.
À peu près à mi-parcours, après la communauté amérindienne d'Iskut, de grands lacs (Eddontenajon Lake, Kinaskan Lake...) offrent des reflets parfaits et l'occasion de faire quelques photos-puzzles !
À Meziadin Junction, on quitte momentanément la Cassiar pour rejoindre Stewart, un petit village canadien perdu au fond d'un fjord infini (l'océan est à plus de 100 kilomètres) : le Portland Canal.
Une communauté encore plus minuscule jouxte Stewart, mais côté américain cette fois car la frontière entre la Colombie-Britannique et l'Alaska passe entre les deux.
Nous effectuons donc notre cinquième
border crossing entre le Canada et les États-Unis pour pénétrer dans Hyder, à l'extrême sud-est de l'état de l'Alaska. Le plus simple de tous... puisqu'il n'y a pas de poste-frontière américain (il y a par contre un contrôle canadien en sens inverse pour revenir à Stewart).
Heureusement nos réserves alimentaires sont suffisantes, parce que si l'on avait compté sur le coin pour se ravitailler... La seule échoppe est fermée jusqu'à l'été prochain, tout comme la seule cabane à fish'n chips qui nous faisait saliver d'avance.
Ce qui nous amène à Hyder : le Salmon Glacier, le plus grand glacier du monde accessible par une route.
Enfin par une route, c'est vite dit : 35 kilomètres d'une piste qui nous aurait fait hésiter avec un 4x4... alors avec un camping-car de 5 tonnes !
Mais la perspective d'une nuit face au glacier (le coin est tellement isolé que c'est tout à fait possible d'y camper) nous a fait surmonter les trous énormes, les pierres, les 1100m de dénivelé à gravir en pente parfois très raide pour notre camion, et le tout sans aucun passage de repos.
Difficultés auxquelles est venue s'ajouter l'obscurité, la faute à notre progression à une vitesse d'escargot...
Arrivée au belvédère final exténués nerveusement, mais les 6 pneus intacts, et juste à temps pour une dernière lueur magique sur le glacier !
Le lever de soleil a définitivement validé tous les efforts pour arriver jusque là !
Best night spot ever !
Le Salmon Glacier forme un « T », et le bras de gauche descend sur des kilomètres dans la vallée. En revanche celui de droite disparaît à grande vitesse et il y a gros à parier que d'ici peu le Salmon Glacier ne dessinera plus qu'un un « L »...
La réussite de cette aventure est totale, puisqu'en grimpant un peu dans les alpages au-dessus de notre campement on tombe sur des champs de buissons farcis de grosses
blueberries.
La récolte est conséquente, mais le
bear spray reste à portée de main car on sait que d'autres amateurs rodant dans le secteur pourraient assez mal prendre notre razzia...
Une dernière pour la route avant d'attaquer la redescente, aussi usante pour la monture que pour le conducteur car outre les ornières il y a le risque de surchauffer les freins - jusqu'à faire éclater un pneu - dans une telle pente. Faut jouer massivement du frein moteur !
Fish Creek, à proximité immédiate d'Hyder, est un ruisseau côtier facile d'accès connu (localement !) pour l'observation des ours, qui viennent ici comme ailleurs se goinfrer de saumons lors de leur remontée en nombre des cours d'eau...
Mais notre timing est clairement moins bon qu'à Haines (à Hyder ce sont des
chum salmons, non des
coho) et le run s'avère déjà terminé.
La rivière est jonchée de milliers de cadavres de poissons, sans doute trop faisandés pour les ours qui ne se montreront pas, et dégageant une odeur difficilement tenable ici malgré notre entrainement depuis Valdez en Alaska...
On quitte Hyder, et cette fois-ci pour de bon la fabuleuse Alaska, avec un passage de frontière un peu surréaliste pour rentrer au Canada lorsque le douanier nous demande si l'on a acheté quelque chose à Hyder... mais où donc ?
Clements Lake, dernière nuit paisible proche de Stewart avant d'en finir avec la Cassiar Highway...
Le genre de panneau que l'on voit tout du long de cette route... Systématiquement lorsque la distance annoncée est parcourue, un nouvel avertissement apparaît pour le tronçon qui suit !
À ce propos une vidéo a fait le buzz au Canada, et a été filmée par une automobiliste sur la Cassiar Highway pile lorsque nous l'avons parcourue, ou à un ou deux jours près : deux grizzlys qui se livrent un match de boxe au milieu de la route, et il y a même un loup au loin qui assiste à la scène (lien
Youtube) !
Dernier crochet avant de filer vers Prince George puis le parc national de Jasper, la communauté amérindienne de Hazelton où est mise en avant la culture Gitksan, et ses spectaculaires
totem poles...
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