Depuis le parc national de Forillon tout au bout de la Gaspésie il faut bien penser à revenir vers Montréal... On a longuement hésité sur l'itinéraire, il y a d'autres parcs un peu partout sur la rive sud du Saint-Laurent et on aurait pu faire des crochets dans tous les sens. Sauf qu'on est limités par le forfait kilométrique du camping-car, et à 20€ par 100 km de dépassement ça peut scorer assez vite si l'on ne fait pas trop attention.
On opte pour quelque chose de simple : longer la côte sud de la Gaspésie au bord de la Baie des Chaleurs, rejoindre le Saint-Laurent par la vallée de la Matapédia, puis tracer tout droit jusqu'à Québec. Soit 900 kilomètres hors petits détours éventuels, et on se prévoit le resto dans le Vieux-Québec dans 48 heures ! Ensuite on ira faire un tour dans le parc de la Jacques Cartier...
La première soirée est pour le village de Percé, très touristique avec beaucoup de restaurants le long de la rue principale. On se contente de la vue depuis la jetée au coucher du soleil, avec le fameux Rocher Percé et l'île de Bonaventure (réserve naturelle abritant des colonies gigantesques de fous de bassan)...
On ne s'y attarde pas trop pour avancer un peu sur la route. Le marché convenu : à la première poutinerie on s'arrête, et on la dénichera dans l'un des villages suivants dont on a oublié le nom, dont la halte routière nous a également permis une nuit de camping sauvage tranquille.
Le lendemain on longe la côte, sans s'enthousiasmer démesurément pour la Baie des Chaleurs...
Faut dire que le ciel gris et les averses jouent pas en sa faveur, au final on regarde le paysage en roulant et sans s'arrêter sauf pour les pauses indispensables : les vendeurs de fish'n chips et les aires de jeux.
La vallée de la Matapédia est avalée elle aussi d'une traite, le vent glacial nous congèle sur place à peine sortis du camping-car et décourage toute tentative d'exploration des environs...
À un tel rythme de progression, c'est pas loin de 700 kilomètres que l'on s'est envoyés en une journée. Le pique-nique du soir dans le parc du Bic...
Puis une nouvelle nuit à l'arrache sur une aire de repos du côté de Trois Pistoles... Québec n'est plus qu'à 200 bornes d'autoroute, on y arrive le lendemain en milieu de journée, et sans mettre de réveil !
Pour le camp de base (après deux nuits hors terrain officiel le réservoir d'eau est vide, les batteries d'appareil photo et des portables sont HS... bref il nous faut un vrai camping et avec laverie parce que ça commence à sentir un peu le poney dans les placards) on choisit l'option « à la campagne » sur un terrain de camping privé, à l'écart de la ville de Québec et même de l'autre côté du fleuve, à Lévis.
De cette manière on pense éviter les problèmes de stationnement dans Québec pour les camping-cars, il y a bien des parkings mais très chers. En outre le seul où il est autorisé de rester garé pour la nuit, sans aucune installation et dans une zone bien laide du vieux port, coûte 60€. Soit plus cher que dans un terrain 4 étoiles...
Et comme il y a des ferries qui font la traversée toutes les 30 minutes (un peu moins fréquemment le soir) depuis Lévis jusqu'au pied du quartier touristique de Québec, ça nous paraît être la bonne solution. En fait sur les parkings proches du quai à Lévis il y a aussi un genre de racket pour les camping-cars, mais on s'en tire pour moins cher (15€ pour la soirée, et on aurait même pu rester jusqu'au lendemain matin) que s'il avait fallu se garer plusieurs heures dans Québec. Et sans doute même qu'à Lévis en se garant dans les rues adjacentes on ne paye rien du tout, mais bon on était à la bourre pour le ferry...
Le vieille ville, le « Vieux-Québec », est encerclée par des remparts ce qui en fait la seule cité fortifiée de toute l'Amérique du Nord.
Avec en vitrine l'immanquable Château Frontenac !
Balade dans les rues...
L'arrêt obligatoire dans un pub, parce que chez nous en Martinique... ça manque !
Pas de resto pour cette fois-ci (on repassera par Québec dans quelques jours) et retour en ferry de l'autre côté du Saint-Laurent pour retrouver notre camping-car garé à Levis, puis rouler jusqu'à notre terrain en rase campagne.
Au coucher du soleil la vue de la ville depuis le fleuve est franchement top !
À proximité de Québec il y a la chute de Montmorency : 80 mètres de haut et plusieurs dizaines de large, ça débite !
La zone n'est pas en accès libre, c'est un parc du Québec. Le parking principal est payant et cher (mais on s'est demandé si il n'y a pas une astuce pour se garer dans le quartier au-dessus de la cascade, où il semble qu'il y ait un autre accès secondaire sans parking) et surtout c'est le débalage touristique avec toute sa panoplie : cars de visiteurs, téléphérique, boutiques de souvenirs... généralement c'est pas le genre de truc auquel on accroche et la chute de Montmorency ne fait pas exception, c'est beaucoup trop fréquenté pour nous.
Alors on se dépêche de retourner en forêt. Le parc de la rivière Jacques Cartier n'est qu'à une grosse demi-heure de route en quittant l'agglomération de Québec vers le nord, c'est une vallée glacière encaissée et c'est très, très sauvage à présent que l'on est vraiment hors-saison. Il n'y a plus grand monde dans les parcs nationaux... et encore moins en semaine !
L'unique route du parc remonte la rivière Jacques Cartier sur un peu plus de 30 kilomètres, par contre elle se transforme en piste sur la seconde moitié, et de plus en plus défoncée.
L'accueil du parc et le terrain de camping sont regroupés au niveau du 10ème kilomètre. Pour les camping-cars il y a aussi une option « lowcost » sur un parking bitumé tout simple, dont le seul équipement est un foyer sur chacune des places pour la flambée du soir. À 5 ou 6 véhicules ça doit pas être très intime, mais vu que là on est tout seuls ça nous va bien.
Toutes ces installations sont regroupées près d'une section élargie et calme de la rivière qui facilite la mise à l'eau et la sortie des embarcations puisque l'activité phare du coin est la descente de rivière en kayak, canoë, raft, bouée...
Le problème : la règle intangible de toutes ces activités c'est qu'il faut avoir plus de 5 ans pour aller sur la rivière en raison de la présence de quelques rapides (il y a plusieurs niveaux mais même la partie basse de la rivière remue par endroit). On a tout essayé pour négocier avec le loueur de canots, Mini-Lapinette a parfaitement récité son texte « je voudrais faire du bateau avec ma maman et mon papa » et sa mine déconfite était impeccable, mais on est tombé sur un incorruptible...
Du coup on se réoriente sur les randos, avec quand même un début de lassitude après bientôt trois semaines à écumer les sentiers en forêt dans tous les parcs nationaux par lesquels on passe.
La plus réputée est baptisée
les Loups et grimpe jusqu'à deux belvédères qui offrent un large panorama sur le parc. Elle est annoncée pour 3h30 de marche et 500m de dénivelé, une belle marche avec le pique-nique au bout en admirant le paysage !
Autant on avait croisé quelques autres randonneurs sur ce premier parcours, autant pour la seconde rando on se lance un peu à l'aventure tout au fond de la vallée, au terminus de la piste. Les dix derniers kilomètres sont infernaux, des trous partout et à peine assez large pour le passage d'un véhicule, sans parler des branches basses... Or pour rappel on n'a ni un 4x4 ni une petite voiture dans les mains, mais un camping-car de 7 mètres de long pesant 6 tonnes ! On doit être les seuls dingues à s'être avancés jusqu'au bout avec un tel tank.
Pourquoi ce choix (plus d'une heure de pilotage quand même pour parcourir les 20 kilomètres depuis le centre d'accueil) ? Et ben parce qu'un garde forestier croisé la veille nous a expliqué que les grands mâles orignaux commençaient en septembre à descendre des plateaux pour venir passer l'automne dans la vallée et en particulier pour y retrouver les femelles à l'approche de la saison de reproduction.
Et qu'en toute logique plus on remonte à leur rencontre le long de la rivière Jacques Cartier, plus on a de chances d'en apercevoir...
La rando s'appelle
la Croisée et va jusqu'à un confluent de vallées encaissées tout au bout du parc. Absolument personne dans le secteur et sans doute même depuis plusieurs jours, du fait de l'éloignement relatif du point de départ des chemins classiques.
Du fait de l'isolement, la méfiance vis à vis des ours que l'on avait mise de côté depuis la Gaspésie refait un peu surface... Pourtant après plusieurs heures de marche le long de la rivière et dans le sous-bois, et un pique-nique au bord du chemin, côté faune on n'a pas vu grand chose.
Mais fallait pas désespérer, voila le bestiau sur lequel on tombe sur le retour !
Un mâle orignal ça avoisine les 2 mètres de haut et pèse plus de 500 kilos... on allait pas lui chercher d'embrouilles pour faire des photos en gros plan...
Au final cette rencontre valait à elle seule les deux jours un peu frustrants passés dans le parc de la rivière Jacques Cartier où l'on pensait s'éclater en canot, mais sans compter avec les limites d'âge imposées pour les navigateurs.
On couronne ça avec un retour à Québec et un bon p'tit resto dans la vieille ville !
Pour la petite histoire au départ on cherchait une poutinerie, mais le vrai resto qui en fait sa spécialité, pas la barraque en bord de route pour camionneurs affamés... La première personne à qui l'on demande nous répond sans hésiter : « Pour une poutine ? Chez Ashton évidemment ! » et il attrape quelqu'un qui passe pour lui reposer la question histoire qu'on soit bien convaincus, le second confirmant effectivement en citant spontanément la même adresse.
On se fait indiquer le chemin en ville, et on se retrouve... devant une enseigne qui a tout d'un fast food, menus burgers au-dessus des caisses et distributeurs de sodas. On a fui, et finalement déniché bien planqué dans une petite rue un pub trèèès sympa qui servait des merveilles de camemberts au four, avec à côté de ça un choix respectable de bières de micro-brasseries locales !
C'est la fin de nos aventures à Québec, on reprend la route juste ce qu'il faut pour s'éloigner et trouver un coin où poser le camping-car dans l'un des petits villages de campagne de la rive sud du Saint-Laurent.
Avec un dernier coucher de soleil sur la ville...
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